Opinion – La noble et difficile mission de ressocialiser la jeunesse

Texte publié initialement dans Folha de S.Paulo le 4 septembre 2025
Ces dernières années, l’inquiétude autour de la souffrance psychique des enfants et adolescents au Brésil s’est intensifiée. Des données récentes du Centre d’Intégration des Données et des Connaissances pour la Santé (Cidacs/Fiocruz Bahia) montrent qu’entre 2011 et 2022, les taux de suicide chez les jeunes ont augmenté en moyenne de 6 % par an. Sur la même période, les cas d’automutilation chez les 10-24 ans ont également fortement augmenté, révélant une situation alarmante de vulnérabilité émotionnelle.
D’autres données provenant du Réseau de Soins Psychosociaux (Raps/SUS) confirment cette tendance. De 2013 à 2023, on a observé une hausse marquée des diagnostics de dépression et de troubles anxieux, touchant des enfants de plus en plus jeunes. Il s’agit d’un problème grave et généralisé dans notre société.
Dans ce texte, je souhaite attirer l’attention sur un groupe souvent oublié : les jeunes privés de liberté — des garçons et des filles qui, très probablement, sont aussi concernés par ces statistiques.
Placés dans des institutions à travers le pays, ces jeunes font face à un avenir incertain, au sentiment d’avoir gâché leur vie, à des parcours familiaux et sociaux marqués par la dureté. Autant de facteurs qui nourrissent une faible estime de soi chronique et favorisent l’apparition de troubles psychosociaux.
C’est pourquoi travailler avec ces jeunes exige une véritable sensibilité judiciaire. Une audience bien menée, un accompagnement de qualité peuvent changer le destin d’une adolescente placée en centre éducatif. Le dire dans un système judiciaire brésilien qui fonctionne comme une chaîne de fast-food — où l’on enchaîne quatre, cinq, voire six audiences par jour — peut sembler totalement abstrait.
Et pourtant, ce qui n’est qu’une audience de plus pour les agents du système judiciaire peut être, pour la jeune personne concernée, un moment décisif — précédé de semaines d’angoisse et d’attentes. L’impact émotionnel et psychique de cette rencontre avec la justice ne peut pas être traité comme un détail. Il faut voir, écouter et être prêt à aider — pas seulement surveiller et punir.
Savoir bien interagir avec des personnes de tout âge dans une salle d’audience demande des compétences et du talent. Travailler avec des enfants et des adolescents aussi — avec une exigence supplémentaire : leur fragilité propre. En tant qu’adultes, nous avons le devoir de protéger les générations futures, même dans un système défaillant qui semble conçu pour l’échec : procédures automatisées, généralisations, refus d’un regard humain et attentif.
La justice socio-éducative doit partir de la notion de responsabilité — parfois pour des actes violents ayant coûté la vie à une autre personne, brisé une famille, causé des dommages irréparables. Cette responsabilité est fondamentale, mais elle doit s’accompagner d’un engagement pour le développement de l’individu.
Il faut aussi reconnaître que la jeunesse, par nature, est marquée par l’impulsivité. Et ceux qui commettent des infractions ne vivent pas dans une société idéale. Les jeunes brésiliens sont exposés à des messages dégradants — routes non pavées, manque d’infrastructures, absence de dignité, ou encore contenus nocifs dans les écrans, les musiques, les publicités — qui produisent des conséquences concrètes, trop souvent traitées à la toute fin de la chaîne.
Ces jeunes sortiront un jour. Le travail quotidien des équipes pluridisciplinaires ne changera pas le passé, mais il peut améliorer l’avenir. Ce sont ces professionnelles qui restent à leurs côtés à chaque heure du jour.
Dans l’État de l’Espírito Santo, où j’ai assisté à un cercle de lecture avec des adolescentes en centre éducatif, j’ai été inspirée par ces femmes engagées. Comme elles, beaucoup d’équipes à travers le pays font ce qu’elles peuvent malgré la pression, les bas salaires, et parfois même le mépris face à l’importance de leur rôle social.
Dans ce contexte, j’exprime ma gratitude aux agentes, psychologues, assistantes sociales, directrices, et à toutes celles qui, jour après jour, remplissent leur mission avec engagement. Une mission aussi difficile que noble : celle de promouvoir la responsabilité tout en tentant d’interrompre le cycle de tragédies, de souffrance psychique et d’abandon social qui frappe la jeunesse brésilienne.
Contenu traduit avec l’assistance de l’intelligence artificielle.
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